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La France parle

« Marchez comme des enfants de lumière »
(Épître aux Éphésiens, V, 8)

Parents, maîtres et éducateurs, nous avons pour mission de mener les âmes des enfants vers la Lumière qui sera le chemin de leur vie et leur bonheur. Chaque semaine, nous vous proposons de découvrir quelques paroles de guides et de témoins pour éclairer notre propre route à l'aune de cette parole de saint Thomas d'Aquin : “Ne regarde pas à celui qui parle, mais tout ce que tu entends de bon, confie-le à ta mémoire.” (Seize conseils pour acquérir le trésor de la science). Bonne lecture !

« Nous sommes de ceux qui brûlent de se soumettre pour être libres. »

Ernest PSICHARI (1883-1914)
Officier et écrivain, Tertiaire dominicain

« Vous ne savez pas ce que c’est que d’être une vieille femme et d’avoir derrière soi un grand passé ; tout un passé à soutenir, et de ne pas pouvoir se déshabituer de la grandeur. Certains disent que je suis toujours jeune et belle, et assurément, je le serais, malgré tout ce que j’ai pu souffrir, si mes fils consentaient à le croire. Mon corps a été trop meurtri au cours des siècles pour que mon âme aussi ne soit pas blessée, et c’est à vous qu’il appartient de le faire refleurir. Jadis j’avais des fils dont l’âme tenait à moi par un lien si fort que leur moindre geste était fait de ma substance…
Il était beau, sous leurs mains impatientes, d’être une créature vivante qui prend conscience de sa forme et peu à peu sent monter en soi la joie de sa force future.
Je leur donnais tout ; mais eux, quelles œuvres ils faisaient de moi ! Tout ce qu’ils touchaient, il semblait que cela fût arraché aux temps et revêtît les plis d’une robe éternelle. Je leur donnais mes eaux paresseuses, mais toujours nobles ou violentes, mais nobles quand même ; mes collines soulevées comme un beau flanc où la lumière et les ombres dessinent la palpitation de la joie ; mes plaines puissantes, qui sont comme l’affirmation éclatante de la certitude, avec pourtant leurs replis secrets, leurs sources parmi l’herbe, et le frémissement à voix basse d’une ligne de peupliers ; mes forêts aux grandes allées droites, non pas repaires sauvages, mais asiles profonds de silence comme l’âme qui écoute sa plus intérieure mélodie…
Ce que je portais en moi de plus caché venait s’inscrire aussi net qu’au jour de mai au porche de la plus humble église et dans le déroulement des alleluias. Ma grâce fleurissait dans le chant des poètes ; et cette grandeur surtout, si unie qu’on la dirait facile, où pourtant je cache le plus de choses secrètes, si grave, je la retrouvais dans le mouvement de la prose puissante et nue.
C’est ainsi que j’éclatais en œuvres.
Et tant de saints, mon Dieu, qu’ils m’ont donnés ! Pourtant, vous le savez, personne n’a envie d’être un saint, et mes fils n’étaient pas meilleurs que les autres : pourquoi est-ce qu’ils ont toujours, au moment qu’il faut, les saints qu’il leur faut ? C’est mon plus grand mystère…
Vous qui m’aimez encore d’un amour pur dans ce monde où tout est impur, il faut que vous sachiez que par vous ma vocation peut aujourd’hui retrouver toute sa pureté. Vous n’êtes pas nombreux à pouvoir le comprendre, mais toute ma force réside désormais dans votre petite armée obscure… Et peut-être alors saurez-vous me connaître vraiment, comme une mère aime à être connue de ses enfants. »

André CHARLIER (1895-1971)
Professeur, directeur de l’école des Roches, puis de Maslacq, écrivain


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