Empereur, nous sommes vos soldats, mais nous sommes serviteurs de Dieu. À vous, nous devons le service militaire ; à Dieu, nous devons l’innocence de nos âmes. (…) Nous avons d’abord prêté serment envers Dieu, ensuite nous avons prêté serment envers le souverain. Sois persuadé que le second n’a plus aucune valeur pour nous si nous avons rompu avec le premier.

Saint Maurice († 286?)
Martyr

« Sous l’empire de Dioclétien, vers la fin du troisième siècle, il y avait dans l’armée romaine toute une légion de Thébains qui faisait profession de la foi chrétienne. Maurice était le chef de cette légion qui comptait six mille six cent soixante soldats dans ses rangs : c’étaient, de l’aveu de tous, les meilleurs hommes de l’armée. Or, voici que le commandant de l’expédition, Maximilien Hercule, déjà associé à la dignité impériale, veut obliger les Thébains à sacrifier aux idoles, et leur imposer le serment de persécuter les chrétiens comme ennemis de l’Empire. À cette proposition, la légion entière se sent atteinte dans son honneur comme dans sa religion : « Empereur, nous sommes vos soldats, mais nous sommes serviteurs de Dieu. À vous, nous devons le service militaire ; à Dieu, nous devons l’innocence de nos âmes. Commandez quoi que ce soit qui n’offense pas l’honneur de notre Créateur, qui est aussi le vôtre ; nous vous obéirons. Quant à nous rendre apostats de notre foi et homicides de nos frères, les serviteurs du Christ, vous n’y réussirez jamais. Nous avons des armes, nous les déposons ; nous nous laisserons égorger sans défense. » Et toute la légion fut immolée ; et elle laissa aux générations à venir cette grande et mémorable maxime, c’est que si les soldats chrétiens se montrent toujours les premiers à obéir à la consigne, c’est à la condition pourtant de ne pas désobéir à la conscience. À l’empereur, notre bravoure guerrière ; à Dieu, l’intégrité de notre foi. Le despotisme païen se le tint pour dit. »

Cardinal Pie (1815-1880)
Évêque de Poitiers, Cardinal de la Sainte Église